Tous unis vent debout contre le "rapport Auzannet". Remis en décembre 2012 par Pascal Auzannet, ancien responsable du développement à la RATP, à Cécile Duflot, ministre de l’Egalité des territoires et du Logement, il préconise le report à l’après-2025 du tronçon Nord et Est de la "ligne rouge" du métro automatique Grand Paris Express. Un report qui concerne notamment la branche Le Bourget - Le Mesnil-Amelot.
Le 23 janvier à l’Assemblée nationale, plus d’une cinquantaine d’élus représentant 49 villes et cinq intercommunalités de Seine-Saint-Denis, de Seine-et-Marne et du Val-d’Oise, ont présenté à la presse une motion commune et un courrier adressé au Premier ministre demandant la réalisation d’ici 2025 de la branche Nord de la "ligne rouge", la rocade du futur métro automatique Grand Paris Express. Cette branche relierait, sur une dizaine de kilomètres, Le Bourget au Mesnil-Amelot, et serait ponctuée de six stations : Le Bourget RER-B, Le Bourget Aéroport, Triangle de Gonesse, Parc des Expositions de Villepinte, Roissy terminal T2, Roissy terminal T 4 et Le Mesnil-Amelot à l’extrémité est de la zone d’activités de Roissy.
Une ligne vitale
Pour ces élus du Nord-est de l’Ile-de France, qui rappellent que les prélèvements fiscaux destinés au financement du Grand Paris Express sont déjà en place, cette ligne est jugée vitale dans la mesure où "elle désenclaverait nos villes et améliorerait le quotidien de 500 000 habitants", permettrait "de réaliser six milliards d’euros d’investissements prévus par des acteurs privés sur le territoire du Grand Roissy", constituerait un vecteur de la création "de 100 000 emplois dans les quinze ans à venir", et soutiendrait "l’effort de construction de 70 000 logements". Des arguments étayés par un sondage récent à l’appui qui démontre l’intérêt des populations pour le projet puisque 80 % estiment que "le métro automatique va améliorer leur quotidien".
Une seule issue
Les élus s’opposent ainsi aux réflexions du rapport Auzannet qui préconisent la réalisation de CDG Express sur fonds publics (1) pour remplacer le métro automatique. "Ce projet n’est destiné qu’aux passagers dits à haute contribution, il n’améliore pas la desserte du territoire ni les transports au quotidien pour les habitants (et il) ne relie pas les pôles de développement". Et l’opération "RER-B +", en voie d’achèvement, se limite à la réhabilitation de la ligne et n’apporte pas d’importantes capacités de transport supplémentaires. Aussi, pour les élus, la solution du métro automatique reste la seule valable, même si elle peut être aménagée (2).
Une rhétorique d'urgence
Et il est vrai que l’impact du report du projet, voire son abandon éventuel, est éminemment politique "alors qu’on nous a vendu pendant trois ans un projet porteur et mobilisateur, cette situation a de quoi décevoir les populations", constatait un élu. Qui évoquait même la possibilité de "troubles sociaux" dans l’avenir, faute de désenclavement des territoires ! Au-delà de l’émotion, cette réaction unanime des élus démontre la difficulté d’assumer un projet de grande dimension dont la pertinence se heurte aux réalités financières. Dans un contexte de débat poussé par une rhétorique de l’urgence qui ne différencie guère les dettes (dites "vertueuses") liées aux investissements et celles nécessitées par le simple fonctionnement de l’Etat. Alors que le tracé du Grand Paris Express ne fait plus débat, la solution ne serait-elle pas dans un phasage plus précis de la réalisation des sections du réseau, voire dans le redimensionnement du choix des modes ? Comme pour les axes vers le plateau de Saclay où on envisage l’option du "métro léger"...
(1)Cette liaison rail-aéroport directe Paris-Est–Roissy devait être réalisée en PPP (Partenariat Public Privé) pour un montant d’origine de 460 millions d’euros. Vinci, la seule entreprise postulante, ayant jeté l’éponge, le rapport Auzannet préconise un montage public associant Aéroports de Paris, RATP et SNCF. Ce qui nécessiterait un apport d’un milliard d’euros, difficile à justifier en ces temps d’économies pour un service souvent jugé comme étant "de luxe" …
(2)Ils proposent de faire des économies de coûts d’infrastructures avec la création de sections en viaducs et non en tunnel comme préconisé à l’origine.