A quoi ressemblera la future métropole à Lille, Lyon et Marseille ? Le terme, "eurométropoles" est même utilisé pour signifier qu’il y a matière à reformer notre organisation territoriale, et la mettre au niveau européen, à l’instar de ce qui a été envisagé, un temps, pour les régions, trop petites, sous- financées par rapport aux fameux Länder.
Le sujet n’est pas nouveau, il a même fait l’objet du rapport Balladur en 2008. Rapport sans doute oublié après avoir connu un vrai succès, et suscité de vraies et intéressants débats sur le phénomène de métropolisation bien présent en Europe.
Les trois villes-phare évoquées en France caractérisant bien la situation rencontrée partout : des agglomérations tentaculaires, imbriquant les compétences de plusieurs villes, débordant sur le territoire d’un département au point de le faire… disparaître du point des vues des services publics.
Le programme 2012-2014 est toutefois moins ambitieux que celui de 2008, qui prévoyait 11 premières métropoles. A savoir : Lyon, Lille, Marseille, Bordeaux, Toulouse, Nantes, Nice, Strasbourg, Rouen, Toulon et enfin Rennes. Depuis, le sujet à évoluer : seules Lyon, Lille et Marseille ont été retenues, afin d’élaborer un projet d’aménagement et de développement économique, écologique, éducatif, culturel et social sur le territoire concerné -un territoire sans enclave- que la nouvelle organisation est censée préparer à la compétitivité à l’échelle nationale et européenne.
Pour les cas de métropolisation concernant plus de 400 000 habitants, l’avant-projet de loi de décentralisation prévoit la création d’une communauté métropolitaine, une possibilité et non une obligation, comme dans le cas précédent où c’est bien l’Etat qui veut mettre de la cohérence et, disons-le, un peu d’ordre dans l’organisation rencontrée. Les frontières administratives intercommunales et l’imbrication des compétences sont en effet devenues à la fois incompréhensibles au commun des mortels et sans doute aussi inefficaces.
Dans les deux cas, le point-clé, c’est le développement économique et social. La réalisation d’équipements permettant ce développement, selon les spécificités territoriales, il pourra s’agir d’infrastructures portuaires ou aéroportuaires, et de zones industrielles. La compétence aménagement et urbanisme d’une part, et logement d’autre part suivent, naturellement.
Pour les autres compétences, la question est réglée par convention avec le département, voire avec la région. Concernant les relations entre l’eurométropole et le département, il faut noter un mécanisme étrange : si le département ne gère plus les affaires "dans les domaines de compétences que la loi lui attribue" (débat sur la clause générale de compétence et son interdiction dans le cadre de la loi de 2010), le département peut déléguer tout ou partie de ses compétences à l’eurométropole dans le domaine des transports scolaires, par exemple.
Il n’y a donc pas substitution de la métropole au département, comme avait pu le craindre d’aucuns qui voyaient là une exclusion automatique de la compétence départementale dans le domaine des transports et partant, l’application de la convention collective urbaine aux relations du travail dans ce secteur.
La première remarque tient donc au caractère facultatif et non pas automatique du transfert de compétence ; dans les transports mais aussi les collèges. La deuxième tient à la compétence transport, évoquée à travers le prisme de la compétence transport scolaire, ce qui la réduit singulièrement.
On rappelle en effet que les départements ont développé, depuis de nombreuses années, des services réguliers ouverts à la clientèle "commerciale" et des services de transport à la demande qui, stricto sensu, n’entrent pas dans la définition des services qui peuvent faire l’objet d’une convention entre le département et la métropole.
La troisième remarque est plus inquiétante. On ne retrouve pas, en dehors de transferts de compétence des communes et autorités organisatrices de transport, nouvellement dénommées de mobilité durable, de mention de la compétence transport pour les communautés métropolitaines. Comment des espaces aussi vastes (plus de 400 000 habitants) pourraient ne pas organiser les transports sur leur territoire en dehors de ceux confiés à eux par leurs membres ? Il n’y aurait donc pas de coordination avec le département ?
Ou alors, autre lecture possible, cette coordination se fera avec le nouveau syndicat mixte de transport voulu par l’avant projet de la loi, à l’échelle régionale ? Comment la communauté métropolitaine participerait-elle à la coordination nécessaire avec le département et la région ? Et si, finalement, le projet, faute d’avoir tranché la question d’une véritable coordination à l’échelle régionale, par la région, mettait l’ensemble des élus locaux devant des montages complexes à réaliser ? En tout cas, l’actuel avant-projet leur laissera deux ans pour aboutir.