La question se pose sous l’angle de la rationalisation de l’action publique. Le fameux "échelon de trop" qui avait incité le précédent gouvernement à envisager la fusion, à terme, du département et de la région, via le conseiller territorial. La clause de compétence générale étant revenue lors de la suppression des dispositions de la loi de mai 2010, cela en était fini du conseiller territorial.
Pourtant le sujet demeure : comment faire des économies ?
La problématique revient à travers la question du qui fait quoi en matière d’intermodalité. Sur la base d’un constat : si les régions font toutes parties des systèmes d’information multimodale (les SIM), elles ont manifesté un enthousiasme mesuré à participer aux syndicats mixtes SRU, lesquels ont été un outil mis au service, presque exclusif, des agglomérations.
Mais en intégrant les départements à la démarche, les agglomérations ont reposé le rôle - et c’est parlant à Lyon - du département dans l’organisation de la mobilité non urbaine. Petit recul en commission des lois, le 27 novembre dernier, sur le rôle que la région pourrait jouer en matière d’intermodalité : un amendement a été adopté visant à rétablir la compétence exacte couverte par le chef de filât régional, à savoir "l’intermodalité et la complémentarité entre les modes de transports", à défaut de "l’organisation de l’intermodalité et de la complémentarité entre les modes de transports", tel que cela figurait dans le texte issu de la seconde lecture au Sénat. L’Assemblée nationale s’apprêtant à défaire, ce que le Sénat avait construit. Rien de vraiment inhabituel...
Les discussions qui se sont tenues éclairent sur le sens de la modification. Pour Dominique Bussereau, "la région joue un rôle majeur pour ce qui est des trains express régionaux (TER), mais les départements assurent le transport départemental, interurbain et scolaire. Dans les grandes agglomérations, ce sont les autorités organisatrices de transports (AOT) qui assurent la réalité des transports".
Même en recul, la mesure semble encore trop favorable à la région, comme en témoigne la formule choc de l’ancien ministre des Transports : "Là encore, la région est un ministère de la parole et non pas un ministère du terrain et de l’aménagement du territoire".
Alors qui ?
Pour Serge Grouard, "l’intermodalité concerne les territoires urbains". Il est indéniable que les progrès de l’intercommunalité aidant, depuis la loi de 1999 qui en a consacré la référence, ce sont les établissements publics de coopération intercommunale qui ont pris le plus souvent la compétence transports, même si l’articulation avec les communes, responsables de la voirie, peut encore progresser.
Mais ce qui est sûr, c’est l’opposition formulée envers la région : "A quoi bon un chef de filât régional, alors que la région ne s’occupe effectivement que des TER ? Concrètement, l’intermodalité est organisée par les villes. Une fois de plus, on complexifie en renforçant de manière systématique, quoique subreptice, les pouvoirs de la région dans des domaines où ce n’est pas elle qui fait le travail".
On ne peut être plus clair. Tandis que l’on recherche une meilleure intermodalité, dans un pays qui a perdu plus de 50% de ses gares routières, des luttes politiques sont présentes. Il est vrai que les projets d’intermodalité - notamment autour des gares et du réseau de la SNCF - ne figurent pas dans les contrats de projets Etat-région actuellement en discussion.
On pourrait objecter que le but de la réforme consiste à changer cela. Soit à faire délibérer la région sur le sujet et d’identifier un maître d’ouvrage si la région ne l’est pas, ne peut pas l’être comme dans le cas de gares ferroviaires, réforme du système ferroviaire aidant. Et Dominique Bussereau d’ajouter : "C’est l’Etat lui-même, via le ministère des Transports, qui lance les appels d’offres dans ce domaine. Il ne fait pas confiance, en l’espèce, au contrat de projets. L’affirmation par cet amendement du rôle de la région est d’autant moins pertinente".
En rétablissant la clause de compétence générale, les tours de table sont désormais de nouveau possible et une concertation peut s’engager sur la création, la rénovation d’un pôle d’échanges multimodal. C’est d’ailleurs souvent - pas suffisamment - ce qui se passe. Reste qu’une collectivité doit prendre l’initiative. Pourquoi pas la région ?