Une interview qui associe l’opérateur de TAD, et le donneur d’ordre. Le tout avec des références de nombre de transporteurs locaux, et un nouvel exploitant
Une interview qui associe l’opérateur de TAD, et le donneur d’ordre. Le tout avec des références pour nombre de transporteurs locaux. Où on retrouve les « zones blanches » évoquées par Élisabeth Borne, en 2017, et pour lesquelles le gouvernement semble vouloir un effort significatif avec le plan pour la mobilité du monde rural (voir notre édito).
Eric Ritter. Les politiques publiques de limitation de l’empreinte carbone des transports privilégient le levier technologique, dans une logique de « croissance verte », en tout cas d’innovation industrielle. Pour favoriser une mobilité durable et inclusive, le développement du TAD peut s’appuyer sur des progrès considérables réalisés dans le numérique. Pouvez-vous me dire quels sont les atouts de votre démarche ?
Aline Mongellaz, Responsable marketing-communication chez Viacitis : D’une manière générale, le TAD et le TPMR permettent une couverture des transports d’un territoire sans investissements majeurs ni construction d’infrastructures.
Bernard Bellegueule, Responsable TPMR de Transvilles (réseau d'agglomération de Valenciennes) : J’ajoute que les infrastructures ajoutent des frais de fonctionnement polluants et de plus en plus coûteux (chauffage, éclairage, eau, etc…) sur le long terme. La limitation de l’empreinte carbone se fait par la nature de la motorisation utilisée, les choix de bon sens inclus dans les règlements (pas de doublon avec le réseau existant, zonage des déplacements par exemple pour les enseignes commerciales, discussion avec les différentes structures d’accueil pour que tous les voyageurs commencent à la même heure par exemple, etc…). Un logiciel performant avec un moteur de calcul de trajet puissant et efficace permet de grouper plus de 50% des courses tout en rendant acceptable ce trajet. Les GPS « temps réel » permettent également de choisir l’itinéraire le plus adapté à l’instant T. Le TAD n’est pas figé sur une ligne prédéfinie.
Eric Ritter: Votre offre vise un public qui éprouve des difficultés à se mouvoir de manière critique. Pourriez-vous nous expliquer la démarche plus en détail?
Bernard Bellegueule : Développé chez nous, elle (l’offre de transport TPMR) permet l’inclusion dans la vie active ou sociale des personnes en situation de handicap. Elle permet à ces personnes de vivre « comme tout le monde », de retrouver un tissu social, une utilité. Elle permet aussi de soulager les familles frappées par le handicap d’un enfant ou d’un proche.
Patrick Lassus, Directeur fondateur de Viacitis : Viacitis (qu’il dirige, cf. note de la rédaction) a maintenant plus de 20 ans d’expérience dans le TPMR. Nous avons donc développé un savoir-faire métier inégalé sur le marché qui se traduit par des paramétrages fins répondant aux besoins des PMR : temps de parcours max., prise en compte des types de fauteuils, d’un accompagnateur, d’un chien guide, temps de parcours max. ou temps de prise en compte etc. De même, nous savons prendre en charge dans un même véhicule des personnes valides et à mobilité réduite. Pas mal en termes d’inclusivité !
Aline Mongellaz : Il y a aussi l’inclusivité au sens « territoriale ». Un service de TAD/TPMR permet de bénéficier d’un service de transport public dans des zones rurales. Ainsi, une offre de TAD bien développée, accessible à toutes et tous pourrait, pourquoi pas, permettre de se passer de l’usage d’une seconde voiture par foyer même en dehors des zones urbaines.
Concrètement, dans le contexte actuel, on parle de pouvoir se passer d’une voiture, de son entretien et des frais de carburant. Au-delà de l’impact écologique non négligeable, il s’agit d’un véritable soulagement financier pour les uns voir même un accès à la mobilité pour des foyers plus modestes.
Bernard Bellegueule : Le TAD permet dans les zones blanches, où les gens sont les plus isolés géographiquement de réduire les distances, de ne plus être dépendant et de retrouver des activités si « faciles » dans le milieu urbain : ex vers l’école, la pratique d’un sport, le travail sont les motifs de déplacement les plus fréquents. Donc des déplacements plutôt « utiles ». L’avantage du TAD est que nous sommes présents à l’instant où le voyageur en a besoin et non comme un bus qui passe de manière mécanique mais peut-être pas adapté. Dans ce principe, nous avons constaté une augmentation de 30% du nombre des courses depuis l’augmentation soudaine des prix du carburant en mars 2022. Preuve que même des gens équipés en automobile se tournent vers un TAD performant. Avec le TAD et TPMR nous transportons de 4 à 99 ans, en terme inclusif c’est pas mal.
Eric Ritter: Il ne s’agit pas uniquement de faciliter la « Mobilité », ce à quoi s’emploient les collectivités et les opérateurs. Il faut, on le voit de plus en plus, développer une offre de mobilité durable et inclusive. A quoi votre « outil » contribue-t-il à ce double objectif ?
Aline Mongellaz : Là, je pense aux possibilités de paramétrages et d’optimisation de Viacitis qui permettent de faire sortir en dernier les véhicules les plus polluants, de réduire le nombre de kilomètres parcourus tout en garantissant des taux de groupage importants, à la prise en compte instantanée des annulations (via les applis) qui permettent de ne pas faire de km inutiles. On peut aussi donner les chiffres, suivre le gain de productivité etc.
Bernard Bellegueule : Avec Viacitis les possibilités sont nombreuses : on peut prioriser des véhicules, des groupages (ex : le travail avant le loisir), optimiser les km commerciaux mais également les HLP (par le choix du lieu de départ du véhicule par exemple). Le fait de pouvoir programmer des courses récurrentes permet de « sécuriser » le transport, rassurer le voyageur et maitriser les km. Viacitis ne se trompe jamais sur la nature du véhicule à envoyer (un VL pour un fauteuil roulant serait mal vécu par la Personne à MR). Également, le moteur de calcul est très efficace et « ouvert ». Il est évident que sans Viacitis, par exemple, le transport du personnel soignant et des vaccinés aurait été beaucoup plus complexe si le logiciel était « fermé ». Il est à noter le rôle essentiel du SIMOUV (notre AOM) un réseau opéré maintenant par Keolis, qui a accompagné, impulsé et porté ces projets.
En conclusion : une AOM par ses choix politiques peut « brider » ou « booster » l’aspect technique du TAD et des possibilités offertes par Viacitis.
Notre AOM a acheté 14 véhicules neufs et propres (les précédents avaient 17 ans !). 16 vont suivre en 2023. Preuve de l’action volontariste de mon AOM (qui peut donner des idées à d’autres) d’avoir des véhicules fiables et propres (aucune panne en 2021 et 2022) ce qui contribue à fidéliser les voyageurs : transports ponctuels et fiables. Pour notre réseau en 5 années (hors covid) nous sommes passés de 20 000 à 35 000 courses. C’est factuel.
Patrick Lassus : A périmètre constant, nos clients transportent 25 % de voyageurs en plus par rapport à d’autres solutions du marché.
Eric Ritter: Il y a un manque de données, notamment économiques, dans le secteur du TAD. Même déployé, le service est conçu comme un « complément » au réseau de transports collectifs, aux lignes régulières. Quelle est votre vision d’une mobilité qui intégrerait plus fortement le TAD dans son bouquet de solutions?
Bernard Bellegueule : Effectivement, le TAD ne peut être qu’un complément à une offre existante, mais on s’aperçoit que dans certains secteurs favorables (ex l’amandinois chez nous) on perçoit un « mini réseau » composé de TAD finalement très efficaces et très utilisés.
Aline Mongellaz : La vision de Viacitis ? Une mobilité durable et inclusive, une mobilité nouvelle et révolutionnaire avec une idée pourtant très simple ! et pas si récente ! L’ambition est ici double : faire matcher une offre avec une demande (et donc faciliter l’usage).
Bernard Bellegueule : Oui tout à fait, la réservation doit être simple et fluide, c’est essentiel : l’outil utilisateur doit être intuitif (c’est le cas avec Viacitis).
Aline Mongellaz : Tous les acteurs de la mobilité ont ici un rôle à jouer : les AOM en mettant en place sur leurs territoires des vraies belles offres de transport à la demande. C’est à dire réfléchir en amont : si l’équipement des véhicules et la formation des conducteurs sont pensées et budgétées en amont, alors le TAD peut vraiment être inclusif tant pour les personnes âgées que pour les personnes en situation de handicap. L’offre de TAD est aussi souple et adaptable aux besoins du territoire : en rabattement sur les centres villes ou en complément zonal. Cette couverture territoriale adéquate sera alors fondamentale pour une bonne fréquentation du service, y compris pourquoi pas, par les actifs qui pourront alors délaisser des modes de transports individuels.
Autre rôle fondamental de la collectivité: la communication autour de leur offre de service.
Bernard Bellegueule : La communication est peu présente car elle risque de faire exploser la demande. Il faut s’y préparer en amont.
Aline Mongellaz : Le TAD est encore bien trop méconnu. Ce qui est un réel frein à l’usage. Pour que l’ensemble des cibles voyageurs (PMR, Séniors, adolescents et actifs) utilisent ces services, encore faut-il savoir que ceux-ci existent d’une part, mais aussi, d’autre part que son usage soit facilité par des offres d’inscriptions en adéquation avec les cibles. Pour viser l’inclusivité au niveau de l’accès au service, il faudrait inclure dans la réflexion les modes d’inscriptions des publics cibles en fonction de leurs « profils ». Ainsi, on observe que certains pourront privilégier la centrale téléphonique là ou d’autres se serviront des applications. L’un n’est pas à exclure de l’autre. Le Maas sera évidemment un vecteur fondamental pour faire adhérer les plus à l’aise avec les technologies mais pour une mobilité vraiment inclusive, gardons à l’esprit la fracture numérique. L’inclusivité passe aussi par-là : garder accessible pour toutes et tous une inscription aux modes de transports « mixtes » : numérique et humaine (centrales téléphoniques).
Bernard Bellegueule : Effectivement. Je me souviens que l’arrivée de Viacitis et l’emploi de sms pour valider les trajets ne s’était pas fait sans difficultés. Une partie du public aura toujours besoin d’un humain au téléphone.
Aline Mongellaz : Evoquée ci-dessus, l’inclusivité relève aussi de l’accès à l’information de l’existence du service auprès des usagers. Le rôle de l’AOM sera de s’adresser, avec un vrai travail de communication, via les canaux adaptés à l’ensemble de ses voyageurs, quelques soit leurs profils. On peut par exemple, noter ici le travail remarquable réalisé à Cambrai en 2022 qui a permis très rapidement de faire entrer le TAD dans les modes de mobilités possibles. Une autre idée, serait de s’inspirer des campagnes d’Orange pour la fibre : des camions sillonnent les marchés de villages pour faire connaître l’offre. Une telle pratique serait parfaite pour toucher des personnes moins à l’aise avec les techniques, par exemple et pourrait être l’occasion d’expliquer le fonctionnement des services de TAD : inscriptions, lignes etc.
Les opérateurs de transport ont bien évidement un rôle fondamental à jouer. Et nous le voyons tous les jours avec nos clients. Et ce, qu’il s’agisse de grands groupes comme d’indépendants. L’implication dans l’organisation du service, dans la reconnaissance et la formation de leur collaborateurs, l’aménagements adéquats des véhicules font aussi toute la différence quant à la réussite ou non d’une offre de service. Nous observons des opérateurs très fortement impliqués dans cette mission de mobilité.
Enfin, en tant qu’éditeur de logiciels, nous remplissons pleinement notre rôle : avec un logiciel mature qui garantit ses déploiements y compris sur de très grosses fréquentations (par ex. le marché d’Amiens Métropole exploité par Taquet Voyages (DSP du réseau à KEOLIS depuis juillet 2022, ou le service Pam 77 de la Seine-et Marne, un support réactif et impliqué dans la réussite des projets (comme à Amiens où la solution a été mise en place en une semaine) mais aussi avec une tarification adéquate à ce marché. Notre modèle économique, une facturation à l’installation fixe puis des frais de fonctionnement à la course (à partir de 0,37 € par course réalisée), permet même aux collectivités territoriales avec des budgets modestes de mettre en place une offre de transport pour toutes et tous.
De plus, les compléments aux logiciels tels que les applications conducteurs, voyageurs et Sms à l’approche couvrent l’ensemble des besoins pour une mobilité fiable (message de réassurance, aide à la conduite etc.), un accès facile à l’usage (quel que soit le profil de l’usager).
Faciliter le travail des opérateurs comme des conducteurs pour la plus grande satisfaction des usagers et donc des AOM, telle est la mission de Viacitis !