Les députés ont bien examiné les dispositions de la loi Macron relatives à la libéralisation du marché de l'autocar. Pas de surprises particulières, le seuil des 100 km et les grands principes déjà évoqués ont été retenus avant l'envoie du texte au Sénat. En revanche, quelques détails relèvent encore d'une forme d'imbroglio typiquement française… Première analyse.
L'autorité de la concurrence avait défriché le sujet et fait de claires propositions en février 2014 : au dessous d'un certain seuil - 200 km à l'époque -, il y aurait risque de "substituabilité" entre le train et l'autocar et donc nécessité d'une régulation.
Le ministre de l'Economie, Emmanuel Macron, a toutefois entamé les débats avec un seuil de 100 km au dessous duquel un régime de déclaration serait mis en place. Dès lors, un régime de pure liberté pourrait côtoyer un régime régulé au niveau infrarégional. Toute la difficulté étant d'arbitrer entre une offre publique, TER par exemple, et une offre d'initiative privée, en autocar.
Des discussions à l'Assemblée nationale, il ressort les grands principes suivants :
- qu'un encadrement des liaisons infrarégionales est nécessaire dès lors qu'un service régulier de transport de personnes sans correspondance est organisé par une autorité organisatrice (des liaisons TER donc, mais aussi des liaisons routières express à l'initiative des départements). Dans ce cas, la liaison pourrait être conditionnée au fait qu'elle ne compromette pas de manière substantielle un service public;
- le seuil de 100 km a été conservé, mais il pourrait être calculé entre deux points quelconques d'une ligne plus longue - ce que Gilles Savary, député de Gironde, appelle un critère kilométrique "glissant".
D'un point de vue pratique, l'opérateur devra donc déposer une déclaration préalable à l'exploitation d'une ligne inférieure ou égal à 100 km.
L'Arafer (Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières), qui veillerait désormais "à la cohérence de l’offre de services de transport collectif, à la satisfaction des besoins, au bon fonctionnement des services institués et organisés par les autorités organisatrices de transport et au développement de l’intermodalité notamment avec les modes de déplacement non polluants", prendrait l'attache des collectivités concernées, qui auraient six semaines pour faire valoir leurs arguments hostiles au projet, aux fins de faire interdire, ou de limiter ces nouveaux services réguliers.
L'Arafer aurait deux mois (trois avec motivation) pour rendre un avis conforme. Celui-ci serait rendu sur la base d'une étude de l'atteinte substantielle à la ligne elle-même et non du contrat. Or, il y a là une difficulté.
Dans le cas des TER, on sait en effet que les régions contractualisent avec la SNCF sur la base d'un contrat à l'échelle régionale, et non pas ligne par ligne, ce que l'opérateur ferroviaire n'est pas encore prêt de fournir, en tous cas pas partout. Imbroglio à la française ou simple vicissitude d'un texte porté à bout de bras par l'exécutif ?
Enfin, conscient de l'importance des gares routières dans la future architecture d'un réseau cohérent de lignes routières nationales, le gouvernement a, à travers ce texte, modifié les règles applicables en matière de création, d'aménagement et d'exploitation des gares routières, là encore avec l'intervention de l'Arafer.
Bus & Car reviendra en détail sur l'ensemble des dispositions de ce texte dans son édition 970 en date du 20 février prochain.