Une nouvelle "mesure phare" du gouvernement prend forme pour les transports publics : un pourcentage obligatoire de véhicules propres est bien à l’étude au ministère de l’Ecologie, et autobus comme autocars sont bien concernés.
Les expériences se suivent...et se ressemblent. Souvenons-nous de l’accessibilité. Une loi de 2005, adoptée avec enthousiasme, et qui s’est révélée inapplicable pour les transports publics locaux. Le délais de dix ans, rien que lui, mettait déjà autorités organisatrices et transporteurs sous tension.
C’est également un délai de dix ans que le gouvernement envisage de laisser aux transports publics pour acquérir des véhicules propres, c'est du moins ce qui est ressorti de la réunion qui s'est effectivement tenue le 18 mai dernier au ministère de l'Ecologie, à 16 h, en présence notamment d'un ensemble de partenaires - autorités organisatrices, transporteurs, constructeurs, etc. - venus là pour consultation.
Cette table ronde était destinée à préparer un amendement gouvernemental tenté au Sénat, mais rejeté, et n’ayant ensuite pas fait l’unanimité en commission mixte paritaire. L'idée de cet amendement porte sur le fait d'imposer dans les futurs contrats de transport de voyageurs passés entre les autorités organisatrices et les exploitants un pourcentage - 50% est fréquemment cité - d’autobus et d’autocars devant correspondre à de nouvelles normes, dites propres, d’ici à 2025.
Côté interurbain, des inquiétudes se font évidemment jour. Un autocar n’est pas un autobus, la technologie applicable à l’un ne l’est pas à l’autre, et les contraintes d'exploitation sont souvent fort éloignées. Dans le cas de l’autocar, la motorisation électrique est pour le moment "hors de portée de la technologie disponible”, indique une source proche du dossier. Mais la volonté d’avancer semble belle et bien présente, malgré les premiers essais peu concluants de véhicules électriques chinois pour effectuer des transports scolaires.
La volonté de poursuivre les efforts en faveur d’une croissance verte va donc se traduire dans les textes très prochainement, si l’on en croit le ministère. Aujourd’hui et jusqu’au 26 mai, l'Assemblée nationale examinera en nouvelle lecture le projet de loi, modifié par le Sénat, relatif à la transition énergétique pour la croissance verte. Et cette volonté sera réaffirmée pendant que les partenaires plancheront sur ce qu’il est possible d’envisager, dans un "délai ambitieux”.
Le texte, parallèlement aux discussions qui se sont engagées sur des normes environnementales à respecter par les autocars dans le cadre du projet de loi Macron (la libéralisation du marché devant, selon les parlementaires, s’accompagner d’un bilan environnemental positif), vise en effet à stimuler l’innovation et la "croissance verte" dans les transports, en faisant des "véhicules propres et sobres” une priorité de la politique industrielle de la France.
Ne nous attardons pas sur un paradoxe : la France est devenue le premier marché européen de l’autocar (aux environs de 4000 véhicules neufs par an), même si seulement quelques unités de production subsistent sur le territoire national. La vigueur de ce marché incite par conséquent à l’importation de matériel roulant plutôt qu’à un renforcement de la production nationale stricto sensu (les coûts de production sont notablement plus bas en Turquie et en République tchèque qu’en France, par exemple ).
Abordons plus particulièrement le volet de la promotion des véhicules propres et sobres dans le cas des transports interurbains. La dernière norme en date, l’EURO VI pour des véhicules réceptionnés après septembre 2014, a déjà fait un grand pas en avant, mais ce n’est pas suffisant.
Un "véhicule propre" est donc un véhicule électrique ou hybride, ou un véhicule roulant au gaz naturel, ou, à la limite, un véhicule a très faible émission de CO2. Si, aujourd’hui 30 % des autocars répondent au minimum à la norme Euro IV, et 20% à la norme Euro V, la progression ne peut globalement s’effectuer qu'en fonction du renouvellement des contrats publics, dont la durée, et donc la fréquence de renouvellement, est globalement plus courte pour les services scolaires que pour les lignes régulières.
Si la date butoir ne tenait compte ni de l’évolution technologique, ni du renouvellement et de l’amortissement naturel des véhicules, elle risquerait une fois de plus d’être inapplicable.
Quant aux finances locales, qui seront indirectement impactées par les besoins imposés en véhicules, pourront-elles vraiment le supporter ?
Espérons que l'impact de cette mesure, aussi noble et ambitieuse qu'elle soit, sera plus clairement mesurée que ne le fut en son temps celui de la loi sur l'accessibilité.