Qui s’en souvient ? La suppression du département faisait partie des mesures nécessaires à une libéralisation de la croissance. Dans un rapport sur le sujet, Jacques Attali, insistait sur le nombre d’échelons d’administration en France, jugé trop important, il était également considéré irréductible à la suite des différentes réformes intervenues. Obstacle technique, obstacle politique ? Sans doute les deux.
En 2008, la France comptait 36 783 communes, 100 départements, 27 régions et plus de 2580 EPCI à fiscalité propre. Et on recensait près de 500 000 fonctions électives dans ces différentes collectivités décentralisées. Par ailleurs, aux services administratifs de ces différentes entités viennent s’ajouter les ministères et les services déconcentrés de l’Etat ainsi qu’une quarantaine d’autorités administratives indépendantes créées depuis 1978, comme l’ARAF, par exemple, dans le domaine ferroviaire.
La loi d’orientation des transports intérieurs, codifiée, a maintenu les échelons administratifs, avec à la clé une spécialisation de fait des échelons : à la région les services ferroviaires régionaux de la SNCF, au département les transports routiers, principalement scolaires. Quant aux intercommunalités, elles ont progressivement pris la compétence transport en développant des réseaux de bus et de tramway au fil du temps.
Selon le rapport de la commission Attali, les redondances et chevauchements de compétences entre les divers échelons territoriaux créent à la fois un éclatement de la responsabilité, la paralysie de la décision, et la déroute de l’administré. Dans les transports : un défaut de coordination, d’interconnexion préjudiciable au développement de l’offre, sa qualité.
Cas typique souligné par la Fédération Nationale des Transports de Voyageurs (FNTV), la problématique des gares routières. Aucune collectivité n’en a vraiment la compétence si bien que le sujet s’est peu à peu délité, au profit d’autres projets urbains, sans concertation entre les autorités organisatrices, et au final, elles ont progressivement disparu. "Une sur deux, auraient ainsi disparu en une trentaine d’années, souligne son secrétaire général, Eric Ritter, et si nous retenons une condition de vente de titres, c’est seulement 20% des préfectures de notre pays qui comptent aujourd’hui une gare routière".
Déjà, en 2008, il s’agissait de renforcer les régions et d’achever la carte intercommunale en harmonisant les périmètres, immanquablement, la question du département se posait, et avec quelles compétences ? Certes, c’est une échelon de proximité, notamment pour les affaires sociales, mais encore ? Il n’y aucun obstacle technique à prévoir une territorialisation des services régionaux, surtout depuis la réformes des TOS (techniciens ouvriers et de service) en 2004.
Un obstacle politique alors ? L’enjeu n’est pas simplement de réaliser des économies, c’est aussi une question de lisibilité et d’efficacité. Dans la nouvelle organisation territoriale il ne faudrait plus que deux niveaux : des régions – fortes ou regroupées - donc peu nombreuses, et des intercommunalités plus puissantes, notamment des agglomérations, dont la population moyenne devrait, selon la commission, se situer dans une fourchette comprise entre 60 000 et 500 000 habitants afin d’atteindre la taille critique qui permet de diminuer le coût des services publics locaux pour le citoyen.
Les départements seraient quant à eux supprimés. La justification d’antan a disparu : la distance à parcourir en une journée à cheval ! Ils ont développé des lignes routières qui pourraient être mutualisées avec les lignes routières mises en place par les régions. Les déplacements s’effectuent aujourd’hui à une échelle plutôt régionale.
Quant aux déplacements périurbains, ceux où règnent la voiture particulière et son cortège d’embouteillage dans les grandes agglomérations, ils pourraient être utilement optimisés en développant le covoiturage et les lignes autocar en pénétrante urbaine. Le mouvement est d’ailleurs déjà enclenché, puisque près de 20 % de l’offre mise en place par les opérateurs urbains est d’ores et déjà sous-traitée par les autocaristes. "Nous avons fait une série de propositions et continuons à travailler avec les ministères concernés : développement des gares routières et des lignes nationales, organisation de services non urbains dans le territoire des nouvelles autorités organisatrices de la mobilité durable en sont les principales. Nous inviterons les élus à en débattre lors de notre prochain congrès, le 8 octobre 2014", insiste Eric Ritter, qui appréhende une réforme passant sous silence la problématique des transports, pourtant essentielle.
C’est à un changement de braquet, qu’il faut aujourd’hui procéder. Réponse dans le projet de loi au sortir du conseil des ministres de ce jour ? A suivre donc.