Le Conseil économique, social et environnemental (Cese) a adopté le 14 avril dernier un projet d’avis sur l’e-mobilité, dans lequel il préconise de créer une plateforme européenne de services de mobilité numérique pour éviter l'hégémonie américaine dans le secteur.
Le développement des outils numériques au service de la mobilité durable peut être une formidable opportunité pour les industriels français, à condition toutefois d'éviter une main-mise du secteur par les géants américains de l'internet, tels que Google, Apple, Facebook ou Amazon (ou Gafa). Pour cela, acteurs français et européens du transport devront s'unir face à l'adversité. Tel est le point de vue délivré par le Centre économique, social et environnemental (Cese) dans un projet d'avis sur la mobilité connectée adopté le 14 avril dernier.
Dans le document, le Cese préconise en effet, entre autres, de construire, à l'échelle européenne, "à partir des grandes entreprises françaises du secteur et en s'appuyant sur leur dynamisme, un champion européen à la taille de l'enjeu". En clair, l'idée serait de créer "une plateforme de services où l’on trouverait toutes les solutions de transport de porte-à-porte enrichies d’offres commerciales et de tourisme". Dans cet "Airbus de l'e-mobilité", chaque acteur du transport français (Etat, collectivités, industriels, opérateurs, etc.), aurait un rôle à jouer.
En concurrençant les géants américains, la plateforme n'aurait pas uniquement des finalités commerciales. "Les services des Gafa ont une finalité extrêmement marchande, et pas toujours respectueuse de la vie privée des individus. Nous devons créer quelque chose qui assure une protection des libertés, tout en proposant des services de qualité", indique Bruno Duchemin, co-rapporteur du projet d'avis.
Une nécessaire remise en cause du droit européen
Cette proposition du Cese n’est pas sans rappeler des précédentes tentatives de création d’autres solutions européennes visant elles aussi à créer des "Airbus européens", et qui se sont souvent soldées par des échecs. Le lancement en 2008 de Quaero, un programme européen visant à créer un moteur de recherche concurrent de Google, fait partie de celles-ci.
L'idée d'un Airbus de l'e-mobilité n'est-elle donc pas vouée à un échec annoncé ? Selon Bruno Duchemin, la réponse est non. "Nous croyons que le sujet doit être européen. En revanche, cela ne doit pas se faire selon un mode opératoire classique [c'est-à-dire très long, ndlr]. Voilà pourquoi nous proposons de pousser les industriels à se regrouper", en mettant notamment en place des financements sur des projets d'innovation. Mais pour que cela fonctionne il faudra aussi, et avant tout "remettre en cause le droit européen des concentrations", indique le projet d'avis, qui peut s'avérer pénalisant vis-à-vis des industries européennes. De même, il sera nécessaire que tous les acteurs se mobilisent, notamment l'Etat, qui "doit prendre conscience de l'importance du sujet", considère le co-rapporteur.