Après la commande par Eurostar de dix ICE 3, les trains à grande vitesse fabriqués par l'Allemand Siemens, le gouvernement français fait de la résistance. Paris invoque la sécurité du tunnel sous la Manche pour défendre le train d'Alstom.
Il est toujours aussi difficile pour les Allemands de débarquer sur le sol britannique. Siemens a pourtant pu y croire en remportant, devant Alstom, un appel d'offres lancé par Eurostar et portant sur l'acquisition de dix trains à grande vitesse.
Mais c'était sans compter sur la réaction du gouvernement français, Jean-Louis Borloo et Dominique Bussereau, venus prêter mains fortes à l'industriel hexagonal en contestant le résultat de l'appel d'offres pour des motifs sécuritaires.
Un avertissement des deux ministres
Les deux ministres ont argumenté leur intervention dans un communiqué : "l'appel d'offres n'est pas conforme aux règles de la sécurité actuelles (...) La France, pleinement responsable de la sécurité sur la partie française du tunnel sous la Manche, ne saurait accepter des conditions d'exploitation qui ne garantiraient pas un maintien, voire une amélioration des conditions de sécurité dans cet ouvrage sous-marin exceptionnel de 54 km de long. Les trois incendies qui se sont produits dans le Tunnel en 1996, 2006 et 2008 ont mis en évidence l'intérêt de règles de sécurités particulières qui ont été régulièrement notifiées à la Commission européenne et publiées sur le site de l'Agence ferroviaire européenne. Il s'agit là d'une responsabilité pénale des décideurs".
C'est pour le moins ce que l'on appelle un avertissement. Eurostar n'a, de son côté, pas manqué de rappeler que la France avait donné son accord au printemps 2010 aux spécifications techniques de l'appel d'offres.
Eurotunnel prône l'ouverture
De son côté, Siemens ne veut pas bouder sa victoire. Avec la Deutsche Bahn, il dispose même d'un allié de choix. L'opérateur ferré allemand compte proposer une liaison entre le nord de l'Allemagne et Londres à l'horizon 2012, en vue des Jeux Olympiques. Pour entretenir la flamme, la DB a procédé à des tests d'évacuation dans le tunnel avant de présenter son ICE 3 à Londres le 19 octobre 2010.
Pour autant, la traversée de la Manche ne s'est pas faite à grande vitesse. Le ministère de l'Ecologie français n'a offert qu'un droit de passage sous condition au train de Siemens. Celui d'être tracté par une locomotive (Bombardier) d'Eurotunnel. Une manière de laisser à Alstom une petite longueur d'avance.
En tous les cas, cette guerre des nerfs franco-allemande n'est pas du goût de Jacques Gounon, le président d'Eurotunnel. Ce dernier assure qu'il ne faut pas "figer les conditions d'exploitation qui date de 1986, jusqu'au terme de la concession, en 2086. Il faut permettre de nouveaux entrants, opérateurs et fournisseurs de matériel, dès lors qu'ils sont homologable". Il est certain que son intervention a été différemment appréciée en fonction de la rive du Rhin où elle a été entendue.